CRIPS ÎLE-DE-FRANCE

Garantir un parcours de santé de qualité pour les personnes migrantes

Pour garantir un parcours de santé de qualité pour les personnes migrantes et envisager concrètement l’atteinte de l’objectif « 3x95 », nous défendons l’efficacité d’une approche basée sur les principes de la santé communautaire - donc des politiques de santé mettant les personnes concernées au cœur des actions et des décisions - ainsi que la levée effective des obstacles à l’accès aux droits et aux soins.

Droits, précarité et VIH

Enquête ANRS-Parcours

Toutes les études montrent que les personnes étrangères font face à des obstacles importants pour accéder aux droits et aux soins et sont plus exposées aux risques de santé. 

Si nous prenons spécifiquement l’angle du VIH, nous pouvons nous appuyer sur l’enquête ANRS-Parcours pour comprendre les trajectoires de vie des migrants originaires d’Afrique subsaharienne vivant avec le VIH en France. Concernant les migrants subsahariens venant de pays où la prévalence du VIH est élevée, l’hypothèse d’une contamination antérieure à leur arrivée en France a longtemps été privilégiée. L’enquête ANRS-Parcours a permis de mettre à mal ces idées reçues et a prouvé que ce sont entre 35 % et 49 % des personnes qui ont été contaminées après leur arrivée dans le pays. La majorité des contaminations s’opère pendant la période dite de « pré-installation » (sept ans en médiane) durant laquelle les personnes ne réunissent pas de conditions administratives stabilisées, un logement personnel et un revenu propre. 

Les conclusions de l’enquête ANRS-Parcours sont claires :  il y a une corrélation directe entre la précarité des personnes migrantes au cours des premières années d’installation en France et l’exposition aux risques sexuels, dont le VIH.

Prévention, lutte contre la précarité, accès aux droits

Sur la base de ces données, nous soutenons trois axes de réponses :
le passage d’une politique uniquement centrée sur le dépistage à l’arrivée sur le territoire à une politique de prévention et de promotion du dépistage à long terme en direction des populations migrantes ;
une action déterminée sur les causes de l’exposition au VIH : précarité, violences, mal-logement ;
un accès réel aux droits et la levée des obstacles juridiques pouvant constituer des entraves à l’exercice de ces droits.

Quelle place pour la santé communautaire

Une approche efficace

La santé communautaire est assurément la meilleure manière de toucher la population ciblée, en adaptant les actions de prévention et d’accompagnement à la réalité de vie des personnes, à leurs besoins réels. Prenons l’exemple de la PrEP en France. Les données de l’ANSM rapportent que parmi les personnes utilisatrices de la PrEP, 98 % sont des HSH et seuls 7,5 % sont nés à l’étranger. Selon l’enquête Rapport au sexe 2019 (ERAS) qui dresse un portrait type de l’utilisateur PrEP : « il a un âge médian de 38 ans, a fait des études supérieures (plus de 80 %), réside en région parisienne (40 %) et considère avoir une situation financière "aisée, confortable" (65,2 %) ». Afin de lutter contre cette inégalité et donner accès à d’autres populations prioritaires, il est nécessaire de proposer un parcours adapté aux personnes. Cela suppose la connaissance des besoins, des réalités de vie, des ressorts culturels, et une capacité à aller vers ces personnes. D’où ce rôle central de la santé communautaire, une démarche qui peut trouver concrétisation via l’action de médiateurs en santé. 

Le rôle des médiateurs en santé

La loi de modernisation du système de santé du 26 janvier 2016 a donné un cadre juridique stable à la médiation sanitaire dont l’objectif est d’ « améliorer l’accès aux droits, à la prévention et aux soins des personnes éloignées des systèmes de prévention et de soins en prenant en compte leurs spécificités ». 

Concrètement, les médiateurs de santé ont à intervenir auprès des publics variés dont les parcours sont marqués par la violence et la précarité. Les thématiques traitées sont larges : prévention, dépistage, information, accès aux soins et lien avec le médical, travail sur l’autonomie des personnes… En somme, un travail indispensable et nécessaire de navigation et d’aide au plus près des personnes en vulnérabilité. C’est pour cela que nous défendons avec force ce métier, son utilité mais aussi son financement par l’Etat à la hauteur des besoins.

Garantir l'accès à l'AME

Lutter contre les fake news

Les conditions d’accès à l’Aide médicale d’État (AME) sont au cœur des débats et réformes depuis de nombreuses années. 

Pour appréhender au mieux le sujet, il est nécessaire de remettre les choses en perspective. D'une part, es dépenses liées à l’AME ne représentent que 0,6 % des dépenses de santé publique en France. D'autre part, les résultats de l’enquête « Premiers pas » indiquent que seuls 51 % des personnes éligibles interrogées bénéficient de l’AME, en dépit d’un état de santé dégradé pour nombre d’entre elles. 

Pour ce qui est de l’efficience des réformes restreignant l’accès à l’AME, l’IGAS dans son rapport intitulé « L’aide médicale d’État : diagnostic et propositions » est très prudente quant au bien-fondé de ce type de mesures : « la mission recommande d’envisager avec prudence toute évolution de l’AME qui aurait pour effet d’augmenter le renoncement aux soins et de dégrader l’état de santé des populations ciblées ».

Des restrictions en contradiction avec l’objectif « 3x95 »

Globalement, nous dénonçons le fait que les mesures restreignant les conditions d’accès à l’AME soient en contradiction avec les objectifs ambitieux fixés par l’État dans le cadre d’une réduction de l’infection VIH et de l’atteinte du « 3x95 » en 2020. Si les dernières données disponibles mettent en évidence une baisse de 7 % des découvertes de séropositivité après plusieurs années de stabilité, aucune diminution n’est observée chez les femmes hétérosexuelles nées à l’étranger. Une augmentation est même constatée chez les HSH nés à l’étranger. 

Un focus est donc à faire sur ces publics, associé à un effort particulier sur la lutte contre la précarité, l’enquête Parcours ayant démontré que la précarité est un déterminant indirect de l’infection au VIH. 

Des restrictions dangereuses pour la santé des individus

Comme le note le Conseil national du sida « ces modalités restrictives de prise en charge sont dangereuses car elles auront pour conséquence d’entraver l’accès aux soins des demandeurs d’asile pendant une période pourtant cruciale, au terme de leur parcours migratoire : chez les plus vulnérables, celui-ci est marqué par une exposition majorée à de multiples risques pour leur santé y compris aux risques d’infection par le VIH et les virus des hépatites ».

Il en ressort que les objectifs fixés par l’État dans la lutte contre le VIH ne pourront être atteints alors que, dans le même temps, l’accès à la santé des populations les plus vulnérables est réduit. C’est sur la base de ces constats que nous prenons position pour une levée des obstacles juridiques et légaux pouvant constituer des entraves à l’exercice des droits par les personnes en situation de migration.

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    Infirmiers diplômés d’Etat : un dispositif d'e-learning sur la santé sexuelle et le VIH/sida - Cloned
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